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Enfants et écrans : comment accompagner ?
La médiathèque départementale a accueilli la conférence de la psychologue Vanessa Lalo dans le cadre d'un partenariat avec Médiat Rhône Alpes, centre régional de formation aux carrières des bibliothèques.
Le numérique, un bouleversement sociétal
Les réseaux sociaux et autres pratiques numériques font partie d'une chaîne de bouleversements sociétaux. Alors que les activités de nos ancêtres tournaient autour de la survie, nous avons aujourd'hui beaucoup de temps libre et évoluons dans une société du divertissement et du loisirs.
Les nouveaux modes de communication ont toujours inquiété (cf invention de l'imprimerie, de la photographie, du cinéma). A chaque période de transition il faut inventer de nouveaux modèles, réinventer de nouvelles façon d'intéragir entre les individus.
Un des 1ers selfies de l'histoire... 1920 !
Enfants connectés... quelles pratiques ?
On estime à 15h par semaine le temps d'utilisation des écrans par les enfants. Il faut se rappeler qu'un adulte travaillant dans un bureau peut être jusqu'à 35h par semaine devant un écran...
Valessa Lalo interpelle sur le rapport des adultes aux écrans. Ils ont bien souvent la même appétance pour le numérique et des comportements similaires à ceux des enfants : un adulte touche en moyenne son téléphone 120 fois par jour... On a l'impression que ce rapport aux écrans est plus utile, plus intelligent... l'est-il toujours ?
Les enfants agissent aussi par mimétisme, ils voient au quotidien l'importance donnée par les adultes à leur téléphone, leur tablette. Ces objets, chers, engendrent également un rapport très précautionneux. Il faut y faire attention, ils sont précieux...
Les chiffres les plus inquiétants concernent les plus jeunes (- de 6 ans) car ils ont doublé ces 5 dernièrs années. Les jeunes enfants sont très friands de vidéos youtube et de jeux. Ces nouveaux usages ont pris le pas sur les temps de télévision. Vanessa Lalo questionne surtout la très grande autonomie des enfants face aux écrans. Quand la TV était dans le salon avec toujours un adulte à proximité, aujourd'hui un enfant peut s'isoler dans sa chambre avec un portable ou une tablette, sans aucun adulte pour l'accompagner et avoir un oeil sur les contenus visionnés. Elle rappelle que les écrans ne sont que desoutils dont l'adulte doit fixer le cadre d'utilisation. derrière le temps passé sur les écrans, il y a la responsabilité des adultes.
Les dangers d'une sur-exposition pour les plus jeunes
> faible développement de la vision périphérique
> retards dans le langage
> problèmes de postures (cervicales, dos...)
> troubles du sommeil liés à la lumière bleue qui empêche la sécrétion de la mélatonine (valable pour tous !)
> sur-stimulation (également valable pour les jouets qui clignotent, font du bruit...)
Mais attention aux discours catatstrophiques, il faut garder une position mesurée entre "tout-écran" et "zéro écran".
Le numérique est très attractif pour l'enfant. Chaque manipulation engendre une réaction, même en touchant de manière aléatoire, l'enfant produit un effet qui appelle une nouvelle action et ainsi de suite... La machine est toujours disponible ! D'autre part les jeux mettent en place des systèmes de gratifications qui encouragent l'enfant : manette qui vibre, bravos et félicitations, feux d'artifice, points gagnés... cette gratification est très addictive. C'est donc aux adultes de fixer le cadre pour accompagner les jeunes dans un usage raisonné des outils numériques. La question du temps passé est importante mais il ne faut pas oublier la question des contenus : le rôle des adultes est de proposer des contenus adaptés et de maintenir le dialogue autour de ces usages. Par exemple un conte numérique de qualité de 10/15 min partagé avec un enfant de 2 ans ne sera pas nocif...
Quelques conseils pour accompagner
> maîtriser le temps
Sur Internet, on peut cliquer à l'infini (notion de sérendipité) et on ne voit pas le temps passer... Il faut poser un cadre à l'enfant en proposant des temps courts avec des contenus adaptés. De 3 à 6 ans on limite à 30 min maximum. Il faut accompagner l'enfant et ritualiser. Dans un jeu traditionnel il y a un début (installation du jeu) et une fin (rangement du jeu) que l'enfant peut appréhender. Avec le numérique il faut aussi rendre l'enfant acteur de la fin tu temps proposé.
> ne pas laisser les enfants seuls face aux écrans, toujours être présent pour pouvoir mettre des mots, vérifier si les contenus sont adaptés
> privilégier la dimension collective qui raccroche au réel ; c'est tout l'intérêt des bibliothèques qui peuvent proposer des ateliers collectifs, en groupe les enfants de parlent, s'auto-régulent, s'aident, partagent leurs expériences...
> favoriser le multi-support et le lien avec des activités dans le "réel" : coloriages, activités manuelles, livres (albums ou pour les plus grands des livres de youtubeurs)
> apprendre aux enfants à se repérer dans l'information, à acquérir un esprit critique, à structurer leurs recherches ; on les pense à tort très à l'aise mais la plupart du temps leurs manipulations sont très empiriques, l'adulte a un rôle indispensable pour les aider à hierarchiser les informations
> proposer d'autres activités pour que le numérique ne prenne pas toute la place, et laisser de la placepour l'ennui, source de créativité
> proposer des contenus de qualité adaptés à l'âge des enfants ; c'est là le rôle des bibliothèques de faire découvrir le meilleur du numérique aux enfants et à leurs parents pour les accompagner dans une découverte intelligente et sensible de ces nouveaux supports
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VANESSA LALO
Psychologue clinicienne, Vanessa Lalo est spécialisée dans les jeux vidéo, les pratiques numériques et leurs impacts (cognitifs, éducatifs et culturels). Elle exerce en libéral, et propose des consultations innovantes pour les parents, adolescents et professionnels.
Elle sensibilise également le grand public sur les sujets des nouvelles pratiques numériques, leurs enjeux & limites, la parentalité au 21ème siècle, les apprentissages autrement (serious games, esport, réseaux sociaux, environnements hybrides) et des nouvelles transmissions créatives (jeux vidéo, médiation numérique, collaboration, ludification, transmedia...).
Elle anime également des formations autour des nouvelles postures professionnelles, des mutations à l’ère du numérique, les écrans en petite-enfance, la présence éducative sur Internet, ou encore l’éducation au numérique et par le numérique.